Côte d’Ivoire : Le premier ministre Gon Coulibaly désigné pour succéder à Alassane Ouattara

Alassane Ouattara et le Premier ministre ivoirien Amadou Gon Coulibaly

Le Premier ministre ivoirien Amadou Gon Coulibaly, très proche du président Alassane Ouattara, a été désigné dans la nuit de jeudi à vendredi candidat du parti au pouvoir à la présidentielle du 31 octobre qui s’annonce tendue.

« Le Conseil politique du RHDP (Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix) m’a désigné, à l’unanimité, comme le candidat du parti à l’élection présidentielle d’octobre 2020. Je mesure l’ampleur de la responsabilité et l’ampleur de la charge », a affirmé le Premier ministre.

Si le choix de son Premier ministre par Alassane Ouattara était un secret de polichinelle depuis des semaines, sa désignation sans vote par le bureau politique, une semaine à peine après l’annonce du président de ne pas briguer un troisième mandat, est une surprise.

« Le RHDP a accéléré le tempo pour laisser le temps à Amadou Gon Coulibaly de faire campagne, d’être visible », estime le politologue Jean Alabro.

Agé de 61 ans, Premier ministre depuis 2017, Gon Coulibaly a en effet accompli toute sa carrière dans l’ombre du président Ouattara dont il est un des proches et dont il a la confiance.

« Cela fait 30 ans que j’apprends aux côtés du président Alassane Ouattara », explique-t-il volontiers.

Il a été le secrétaire général de la présidence de la République, de l’arrivée au pouvoir de Ouattara jusqu’à sa nomination comme Premier ministre.

Ancien haut fonctionnaire et ancien ministre de l’Agriculture, il a été formé en France et, comme son mentor, maîtrise bien les circuits financiers internationaux.

– Cassant et clivant –

Père de cinq enfants, M. Gon, issu d’une grande famille de Korhogo, dans le nord de la Côte d’Ivoire, est à ce titre très influent chez les chefs traditionnels. Il a été maire de Korhogo (quatrième ville du pays) de 2001 à 2018.

Dans les rangs du RHDP, certains, sous couvert d’anonymat, mettaient en doute avant le bureau politique la pertinence de sa candidature. « Gon n’est pas charismatique. Il est cassant. Il est clivant au sein de notre camp. C’est un grand travailleur, un excellent ministre ou Premier ministre mais ce n’est pas un bon candidat ».

Si le puissant ministre de la Défense Hamed Bakayoko lui a fait immédiatement allégeance, d’autres barons s’en sont abstenus.

« Si nous voulons que notre pays continue d’évoluer dans l’esprit de gouvernance (de Ouattara), Gon est le mieux placé », a affirmé Hamed Bakayoko,à qui certains prêtaient une ambition présidentielle et une rivalité avec le Premier ministre.

« Ne prenons pas des engagements d’une heure dans une salle, qui par la suite ne reflèteront pas la réalité sur le terrain », a en revanche affirmé sur sa page Facebook le ministre de l’Enseignement supérieur, Albert Mabri Toikeusse, qui avait évoqué sa propre candidature.

L’absence du ministre des Affaires étrangères Marcel Amon Tanoh, lui aussi candidat potentiel, a également été remarquée au bureau politique.

« A partir du moment où Ouattara n’était plus candidat, il fallait réajuster la stratégie pour mobiliser autour du nouveau leader, et couper toute velléité d’autre candidature », analyse le politologue Arthur Banga.

Depuis quelques mois et contrairement à ses habitudes du début, le Premier ministre, qui est aussi devenu plus avenant avec les journalistes, s’est souvent mis en avant lors des manifestations publiques.

Le 5 mars, le président Alassane Ouattara a mis fin à des mois de suspense en annonçant qu’il ne briguerait pas un troisième mandat, une décision surprise saluée dans le pays et à l’étranger.

Le climat politique est tendu en Côte d’Ivoire avant la présidentielle qui se tiendra dix ans après la crise post-électorale de 2010-2011, née du refus du président Laurent Gbagbo de reconnaître sa défaite face à Alassane Ouattara, et qui avait fait 3.000 morts.

Au sein de l’opposition, l’ancien Premier ministre Guillaume Soro, 47 ans, ex-chef de la rébellion pro-Ouattara, mais devenu un de ses adversaires, est le seul à s’être déclaré candidat. Accusé de complot, sous le coup d’un mandat d’arrêt en Côte d’Ivoire, il vit actuellement en France.

L’ex-président Henri Konan Bédié (1993-99), chef du principal mouvement d’opposition, le Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), laisse planer le mystère sur son éventuelle candidature.

L’ex-président Laurent Gbgabo (2000-10), figure tutélaire du Front Populaire ivoirien, l’autre grand parti d’opposition, est en liberté conditionnelle en Belgique, dans l’attente de l’examen de l’appel de son procès devant la Cour pénale internationale, après son acquittement en première instance.

 

SOURCE : AFP