Togo/Journalistes condamnés à 3 ans de prison : Leur avocat parle de l’audience et du contenu de la décision

Me Elom Kpadé

Ferdinand Ayité et Isidore Kouwonou, respectivement directeur de publication et rédacteur en chef du bihebdomadaire L’Alternative ont été condamnés à trois ans de prison ferme mercredi par la chambre correctionnelle du tribunal de grande instance de Lomé.

Ils sont mis en examen depuis décembre 2021 pour « outrage à l’autorité » et « propagation de propos mensongers sur les réseaux sociaux », suite à des plaintes des ministres de la justice et du commerce pour des propos tenus dans une émission diffusée sur Youtube.

Ferdinand et Isidore étaient absents à l’audience. Me Elom Kpadé leur avocat, rencontré par l’Agence Savoir News, parle de l’audience et du contenu de la décision du tribunal.

« L’audience a eu effectivement lieu, au tribunal de grande instance de Lomé. Il a été question de plaider le dossier de manière contradictoire pour que le tribunal puisse se faire une idée de l’effectivité de l’infraction reprochée à Ferdinand Ayité et à Isidore Kouwonou. Etant donné que les prévenus n’étaient pas présents, j’ai demandé formellement un renvoi pour que le Parquet procède à une nouvelle citation à prévenu, pour qu’on puisse vérifier si les deux journalistes doivent comparaître effectivement à la prochaine audience, si renvoi il y a », a expliqué Me Kpadé.

« Mais le tribunal s’est opposé et à l’opposition du tribunal, je me suis déporté du dossier, c’est-à-dire que je me suis déconstitué, puisque je ne pouvais pas valablement plaider en l’absence de mes clients », a-t-il précisé.

« Il s’agit d’un procès expéditif. Le Parquet a fait ses réquisitions et le tribunal a entièrement suivi le Parquet ce que a demandé. Ferdinand Ayité a été condamné à 3 ans de prison ferme, Isidore Kouwonou a été condamné à 3 ans de prison ferme. Ferdinand a été condamné à 3 millions de F.CFA d’amende, Isidore aussi à 3 millions de F.CFA. Et un mandat d’arrêt international a été lancé contre les deux », a détaillé Me Kpadé.

‘C’est un peu décevant’

« Notre réaction par rapport à ce qui s’est passé ? Ce qui s’est passé est un peu décevant sur deux volets. (1) les personnes poursuivies sont des journalistes et au Togo, le délit de presse a été dépénalisé. Nous avons toujours soutenu que, ce qu’on leur reproche dépend directement du code de la presse. Donc, si jugement doit y avoir, cela doit être sur la base du code de la presse. On ne doit pas les juger sur la base du code pénal pour aboutir à des peines privatives de liberté. (2) Nous déplorons le non-respect du principe du contradictoire, qui est véritablement le socle de l’équité dans un procès. L’avocat s’étant déconstitué, il appartenait au juge de faire respecter, à l’égard des prévenus, ce principe du contradictoire, puisque la loi est clair là-dessus, le juge a l’obligation lui-même de respecter le principe du contradictoire, en s’assurant après déconstitution de l’avocat des prévenus, si ceux-ci doivent organiser leur défense eux-mêmes ou bien avoir un autre avocat. Donc, ce principe aussi a été violé », a déploré l’avocat.

« A l’égard de Joël Egard, l’action publique est éteinte, puisqu’il est décédé. Il n’a pas été condamné », a-t-il souligné.

Et quelle sera la suite ? « Je vais discuter avec mes clients pour voir essentiellement l’opportunité de relever appel. Mais je crois qu’il y a une très forte probabilité pour nous, d’interjeter appel contre la décision du tribunal », a ajouté Me Kpadé. FIN

Junior AUREL