Lutte contre le diabète : Dr BAH El Hadj Zainoul nous dit tout
LOME, 21 ocy/2025 (Savoir News) – Le diabète est une maladie chronique qui apparaît lorsque le pancréas ne produit pas suffisamment d’insuline ou que l’organisme n’utilise pas correctement l’insuline produit. L’insuline est une hormone qui régule la concentration de sucre dans le sang.
Plusieurs signes indiquent un diabète : fatigue, faim, soif, urine fréquente, etc.
Dans une première interview accordée à l’agence Savoir News, Dr BAH El Hadj Zainoul (diabétologue de nationalité guinéenne) nous parle des diabètes, du diabétique, du diagnostic…
Dr BAH, parlez-nous de vos spécialités
Dr BAH : Je suis spécialiste en endocrinologie, diabétologie. Je suis également un spécialiste des maladies métaboliques et nutrition.
Je travaille à l’hôpital national Donka, je suis enseignant à la faculté de médecine de l’Université Gamal Abdel Nasser de Conakry et parallèlement, responsable de suivi-évaluation du programme national de lutte contre les maladies non transmissibles au ministère de la santé et de l’hygiène publique de mon pays.
Docteur, diabète au singulier ou avec un « S » ?
Merci, c’est bon de démystifier ce point-là. Actuellement, nous, nous parlons des diabètes. Nous ne parlons pas du diabète, puisqu’il y a plusieurs types de diabète. Donc les informations ne sont pas les mêmes lorsque vous prenez un type, comparé à un autre. Donc nous, nous commençons à changer de langage, surtout dans notre pays, en disant que ce sont « les diabètes ».
Alors, lequel est le plus courant ?
En termes de fréquence relative, c’est le diabète de type 2, qui est le plus fréquent. A part le diabète de type 2, il y a le diabète gestationnel. Mais dans le contexte guinéen, il advient mais de façon méconnue. Après ça, il y a également le diabète de l’enfant. Donc voilà un peu les trois types de diabète que nous rencontrons fréquemment en Guinée. C’est pourquoi nous avons commencé à changer de langage en disant « les diabètes ».
Lequel mérite beaucoup plus d’attention ?
Pour aller cas par cas, vous savez, le diabète qui fait l’épidémie mondiale actuellement, c’est celui de type 2. Mais, bien entendu, le diabète gestationnel est un facteur de risque de survenu d’un diabète de type 2, aussi bien pour la femme, que pour l’enfant dans le futur. Donc nous leur accordons la même attention.
Et lorsqu’on prend maintenant le diabète de l’enfant, ça aussi c’est un autre problème, puisque nous n’avons pas encore fini de trouver la côte des enfants diabétiques en Guinée.
Il y a des enfants actuellement qui meurent dans des services d’urgence avec des diagnostics erronés, qui meurent bien sûr avec un diabète non diagnostiqué. Soit on les caricature comme décédés suite à des neuro paludismes ou à des insuffisances respiratoires aiguës, c’est des choses comme ça. Donc en termes de priorité à accorder, que ce soit diabète de type 2, que ce soit diabète de type 1, que ce soit diabète gestationnel, on leur accorde la même priorité.
Alors, qui appelle-t-on diabétique ?
De façon simple sans aller trop dans l’académie, retenez que, lorsqu’il y a une hyperglycémie qui perdure dans le temps chez un sujet, c’est ce qu’on appelle diabète.
En termes techniques, on parle d’hyperglycémie chronique ». Elle est liée soit à un défaut de l’action de l’insuline sur les tissus ou à un déficit de sécrétion de l’insuline par le pancréas. Et bien entendu, il peut s’agir aussi de l’association de ces deux phénomènes, qui conduit à une hyperglycémie chronique. Voilà un peu ce qu’on appelle diabète.
A partir de quelle valeur on pose le diagnostic de diabète ?
Nous avons deux cas. Il faut noter qu’au niveau des femmes enceintes, les critères ne sont pas du tout comparables au reste de la population. En Guinée, actuellement dans le protocole national, on commence à donner des explications très claires aux gens.
Face à une femme enceinte qui ne se connaissait pas diabétique, voilà les deux questions qu’on pose : Est-ce que la femme est enceinte ? Est-ce qu’elle ne se connaissait pas diabétique ? Lorsque la réponse à ces deux questions est « oui » et « oui », on fait la glycémie.
Alors, comment se fait cet examen ?
Nous avons les glycémies à jeun et les glycémies non à jeun.
Les glycémies à jeun pour une femme enceinte ne doivent pas atteindre, ni dépasser 0,92 g par litre. Donc pour être sûr du diagnostic, lorsque la glycémie à jeun chez une femme enceinte est supérieure à 0,92 g par litre, nous posons le diagnostic de diabète gestationnelle, si toutefois elle a répondu « Oui et Oui » aux deux premières questions.
Lorsqu’elle a déjà mangé …
Lorsqu’elle a déjà mangé, on parle de glycémie post-prandiale. Elle est évaluée par l’épreuve d’hyper glycémie provoquée par voie orale. L’examen teste la réponse de l’organisme à une épreuve glycémique via 75g de glucose oral. Le diabète est diagnostiqué si la glycémie à 1 heure est supérieure à 1,80g/l ou si la glycémie à 2 heures est supérieure à 1,53g/L. Si cette épreuve n’est pas effectuée, on essaie d’interpréter les glycémies après les repas chez la femme enceinte qui ne se connaît pas diabétique, utilisant la valeur de la même façon que celle de l’hyperglycémie provoquée.
Et les données confirment la justesse du diagnostic ainsi posé. En complément de la glycémie, l’examen de l’hémoglobine glyquée est utilisé pour valider les résultats. Cet examen est particulièrement pertinent lorsque la femme est vue tardivement, par exemple autour de deux ou trois mois après la grossesse, car il permet de trouver si l’hémoglobine glyquée est modifiée, ce qui vient corroborer le diagnostic de diabète gestationnel.
Que dire des autres types de diabètes ?
Afin de diagnostiquer les autres types de diabète, l’analyse repose sur les glycémies à jeun et les glycémies non à jeun. Concernant les glycémies à jeun, on parle de diabète si la valeur est supérieure à 1,26g/l à deux reprises le même jour. La glycémie post-prandiale, que l’on considère à partir de 2 heures après les repas, est également indicatrice de diabète si elle est supérieure ou égale à 2g/l.
Ce sont là les cas dans lesquels on doit déclarer un diabète. Retenez qu’en tant que spécialistes, il y a une fraction de sujets, qu’on diagnostique au stade de prédiabète. Les valeurs de glycémie ne sont pas les mêmes, elles sont un peu moindres que celles que j’ai décrites tantôt, mais retenez qu’il a également ces cas.
Il faut cependant noter qu’il existe une fraction de sujets que l’on diagnostique au stade de prédiabète. Les valeurs de glycémie pour le prédiabète ne sont pas les mêmes ; elles sont un peu moindres que celles écrites tantôt, mais il faut retenir que ces cas existent également.
On conseille souvent aux diabétiques, d’avoir une alimentation saine…
La prévention du diabète de type 2 ne repose pas uniquement sur une bonne hygiène alimentaire, mais sur un ensemble d’éléments qui y concourent au niveau individuel. Ces mesures incluent une alimentation équilibrée (moins salé, moins sucré, moins gras), la pratique régulière d’une activité physique (trois fois par semaine, 30mn à une heure par séance), l’arrêt du tabac, la limitation de l’alcool, et l’évitement de l’obésité.
De plus, les questions comme l’hypertension artérielle et la dyslipidémie (mauvais cholestérol) doivent être traitées et suivies, car l’hypertension (souvent liée à la consommation d’aliments trop salés) est un facteur de risque de survenue d’un diabète. Au niveau du système de santé, il est crucial d’encourager le dépistage (systématique pour tout patient) du diabète de type 2 et du diabète gestationnel, ce qui nécessite de former les prestataires au niveau opérationnel et de les outiller en petits matériels et consommables.
Comment contenir cette lutte à divers niveaux ?
La lutte globale contre le diabète requiert une approche multisectorielle fédérant les ministères (santé, communication, action sociale), les associations des médias et la société civile.
Les programmes nationaux de santé doivent élaborer un plan de communication en concomitance avec le ministère de la communication, axé sur les facteurs de risque modifiables (alimentation, activité physique, etc.), et tenant compte des facteurs culturels et religieux locaux pour démystifier les choses.
Enfin, le ministère de la santé doit adopter une bonne approche en se concentrant sur les individus selon leur profil de risque : les personnes non malades, non exposées à aucun facteur de risque (population juvénile), les sujets qui sont exposés à des facteurs de risque (stressés, obèses, hypertension, dyslipidémie, pauvreté), et les malades, qui se divisent en malades connus et malades asymptomatiques (méconnus, non diagnostiqués), dont certains se tournent vers l’indigène ou la tradithérapie.
Emile KOUTON
