Le 31 juillet : Une date, des attentes et mille supputations (PAPIER D’ANGLE)

epa06469040 President of Guinea Alpha Conde (L) talks with President of Ghana Nana Akufo-Addo (R) during the inauguration of president elect George Weah at the Samuel Kanyon Doe stadium in Monrovia, Liberia, 22 January 2018 (issued 23 January 2018). The inauguration of President-elect George Weah held at a sports stadium is the first ever in the history of Liberia. Weah is the world's first football star to be democratically elected President. Weah will be sworn in as president on 22 January, to succeed incumbent President, and Africa's first female democratically elected President, Ellen Johnson Sirleaf, who concludes her second and final term in office. EPA/AHMED JALLANZO

« J-7 : la Cédéao et le destin du peuple togolais », a affiché ce mardi 24 juillet sur sa page Facebook, une jeune togolaise vivant en Allemagne. Effectivement, le peuple togolais attend patiemment le +verdict+ des chefs d’État de la communauté économique des États de l’Afrique de l’ouest (Cédéao), le 31 juillet prochain dans la capitale togolaise, dans la crise qui secoue le pays depuis plus de dix mois.

Les chefs d’État de la sous-région ouest africaine, se sont totalement saisis du dossier togolais depuis quelques mois, le dialogue entamé le 19 février n’ayant pratiquement rien donné. La commission de la Cédéao, serait à pied d’œuvre pour son rapport, à soumettre aux chefs d’État, qui se prononceront le 31 juillet.

Pour l’instant, dans les états-majors des partis politiques, notamment des protagonistes (coalition des 14 partis politiques de l’opposition et parti au pouvoir), tout le monde retient son souffle, même si par moments, chacun tente de se donner de la voix.

« Nous attendons une feuille de route de la Cédéao qui naturellement tienne compte des aspirations profondes du peuple togolais », a déclaré le week-end dernier lors d’un meeting, Mme Brigitte Adjamagbo-Johnson (coordonnatrice de la coalition de l’opposition).

« La vigilance s’impose car la feuille de route attendue de ce sommet doit absolument tenir compte des aspirations profondes du peuple togolais. Elle ne peut aucunement ouvrir la voie au chef de l’État togolais, de prétendre postuler à un quatrième mandat présidentiel, alors qu’il en exerce déjà un troisième, en violation de la règle communautaire. Le contraire serait incompréhensible, injuste et surtout de nature à aggraver davantage la crise, avec des conséquences sécuritaires pour le Togo et leurs débordements certains dans la sous-région », a appuyé Nathaniel Olympio (président du Parti des Togolais) dans une +Lettre ouverte+.

« Nous avons le droit de dire Non, si la décision de la Cédéao ne nous convient pas », a de son côté averti Eric Dupuy (responsable à la communication de la coalition).

 

« Dès le 1er août prochain (..), s’ouvrira alors un chapitre nouveau »

 

Du côté du pouvoir, on affiche une certaine sérénité. Ce qui pousse certains observateurs de la scène politique togolaise à se demander si les autorités au plus haut sommet de l’État, ne sont pas dans le « secret des dieux ».

« Dès le 1er août prochain, le temps des diktats, des postures de blocage et d’une volonté manifeste de statu quo que dénoncent à juste titre certains dirigeants étrangers sera totalement révolu. S’ouvrira alors un chapitre nouveau et chacun comprendra que la sagesse et le sens de responsabilité de la majorité silencieuse et des pouvoirs publics ne sont nullement des signes de faiblesse et de résignation », a affirmé dimanche dernier dans une interview Gilbert Bawara (ministre de la fonction publique).

« Il n’y aura plus jamais d’autre 19 août 2017. Les dirigeants de la sous-région et les facilitateurs sont suffisamment édifiés sur les enjeux. Il n’y a pas et il n’y aura nul besoin d’aucun autre mandat spécifique pour leur permettre de montrer aux acteurs politiques togolais la voie à suivre. L’heure est désormais aux actes, aux décisions et à l’action déterminée pour normaliser totalement et durablement la situation. Les repères et le fondement des décisions attendues sont parfaitement connues, ce sont les valeurs, les normes et les principes qui sous-tendent la démocratie et l’État, qui s’appuient solidement sur des règles juridiques essentielles et que reprennent largement les instruments communautaires pertinents, notamment le protocole additionnel de la Cédéao relatif à la démocratie et à la bonne gouvernance », avait martelé le ministre.

Ces portions de phrases de son intervention, sont fortement analysées et commentées par des journalistes dans les canards et sur des radios privées, lors des émissions à grande audience.

« C’est la position du gouvernement clairement affichée, car le ministre n’a rien inventé. Lorsque vous lisez attentivement l’interview, les mots sont bien choisis. J’ai plutôt l’impression que le pouvoir en place sait déjà ce qui se passera le 31 juillet », a commenté le directeur de publication d’un hebdomadaire sur une radio privée.

 

Vive les supputations

 

Les supputations vont bon train depuis quelques jours. Dans les rues, les bureaux et les places publiques, et surtout sur les radios privés, chacun tente d’imaginer les scénarios possibles. Et tous les commentaires se focalisent sur la candidature du président Faure Gnassingbé en 2020. C’est d’ailleurs le principal point d’achoppement des discussions entre le pouvoir et la coalition de l’opposition. Elu en 2005, Faure Gnassingbé a été réélu en 2010 et 2015.

« La Cédéao ne peut jamais venir nous dire que Faure Gnassingbé sera candidat en 2020 », a estimé Nicodème Habia, président du parti les Démocrates (membre de la coalition de l’opposition).

« Aucun président de la sous-région ne peut interdire à Faure Gnassingbé de se représenter en 2020. Même si les réformes sont faites aujourd’hui, il peut juridiquement être candidat, s’il le désire », a rétorqué un cadre du parti au pouvoir.

Pour Mme Alice Atanglo (chef des crédits dans une institution financière), les chefs d’État de la Cédéao, « ne donneront aucune position claire » le 31 juillet, pour « éviter de nouveaux soulèvements et des violences dans le pays ».

« Les positions sont déjà trop tranchées et la tension a monté d’un cran dans le pays. La Cédéao ne va rien décider le 31 juillet. Les chefs d’État, dans leur communiqué, afficheront une position très sage, afin de ne pas frustrer tel ou tel camp », a analysé Mme Atanglo.

« A l’allure où vont les choses, la Cédéao va lever le ton. Elle va sûrement menacer les protagonistes de la crise, de sanctions », a indiqué un journaliste.

Rappelons que le Togo traverse une nouvelle crise août dernier, avec des manifestations répétées d’une coalition de 14 partis politiques de l’opposition qui exige notamment le retour à la constitution originelle de 1992, la révision du cadre électoral et l’instauration du droit de vote de la diaspora. Le dialogue entamé le 19 février, n’a connu que quatre séances: 19 février, 23 février, 23 mars et 27 juin. FIN

 

Junior AUREL