Les vendeurs à la charrette : Au cœur d’une activité peu ordinaire (MAGAZINE)

Un médjida rencontré dans une rue de Lomé.

Cadenas, pinceaux, pinces à linge, ciseaux, rallonges, tournevis, etc.… entassés dans un pousse-pousse, Ali le Médjida observe une pause à l’entrée du marché Assiyéyé de Hedzranawoé.

C’est lundi, l’un des jours où ce marché est le plus animé. Et Ali (23 ans) fait partie de ces vendeurs ambulants (communément appelés Zaarma ou Médjida) qui exposent aux bords des voies, leurs marchandises entassées dans des poussepousses.

« C’est un travail un peu difficile, mais qui nourrit son homme », confie-t-il avec sourire.

Non loin de lui, Dogo (grand en langue Haoussa), arrange son étalage, le cure-dent dans la bouche.

Ils sont de plus en plus nombreux, ces jeunes nigériens et maliens qui traînent à longueur de journée, leurs charrettes dans les rues, les marchés et les ruelles de la capitale.

 

Une activité difficile et harassante, mais rentable

« Les fainéants ne doivent pas s’y aventurer, car il faut marcher à longueur de journée. J’ignore le nombre de kilomètres que je parcours par jour. Mais à la fin de la journée, c’est ma recette qui constitue ma joie », raconte Moussa, assis sur une brique devant son pousse-pousse dont les pneus sont totalement amortis.

« Être un bon sportif est un atout, car le principe est la marche. On n’arrive jamais à compter le nombre de quartiers parcourus dans une journée. A chaque occasion, il faut proposer les marchandises aux passants. Certains n’hésitent même pas à nous refouler », ajoute ce jeune nigérien de 26 ans, arrivé à Lomé depuis 2016.

Ce dernier a démarré son activité avec un capital de 100.000 FCFA, sans compter le coût de fabrication de son pousse-pousse.

Des Médjida devant le marché de Hedzranawoé.

« Une fois le pousse-pousse réalisé et les marchandises achetées, je me suis lancé dans la bataille. Je vous avoue que mes débuts ont été difficiles, car je ne maîtrisais pas les rouages de ce commerce. Mais une fois rôdé dans le système, j’ai pris le pli. Mes recettes journalières varient entre 2.000 et 15.000 F.CFA », dévoile Moussa.

« J’atteins parfois 20.000, voire 25.000 F.CFA de recettes par jour », renchérit Abdul, 35 ans, assis devant un plat chaud de « ayimolou » (riz aux haricots). Ce « Médjida » vit à Lomé depuis 17 ans et fait partie des vétérans dans l’activité. 

 

Le bétail et la maison au pays : rêves à réaliser

Pour le jeune Médjida, disposer d’un bétail au pays, est indispensable pour une vie paisible. Et presque tous les Zaarma du Togo ont le même rêve : le bétail et la maison.

Ali, un médjida habitué du marché de Hedzranawoé

« Mon rêve à moi, c’est d’avoir un grand troupeau de bœufs et ma petite maison au village. Je me bats dur, pour envoyer une partie de mes bénéfices à mon père pour progressivement, donner corps à mes projets. Pour la plupart d’entre nous, c’est la même méthode », confie Massaoudou, rencontré à Déckon.

Il a démarré son activité en 2012, mais il a déjà un troupeau de 6 bœufs et vaches au village.

« J’aide aussi de temps en temps, mes quatre petits frères et sœurs restés au village », se réjouit-il.

 

Communauté de solidarité et d’entraide

La plupart de ces Zaarma, vivent dans une ambiance de solidarité. Les aînés n’hésitent pas à soutenir les plus jeunes dans leurs activités. Issa, 21 ans, qui entend démarrer incessamment son activité, joue à l’apprenti, auprès d’un autre plus expérimenté.

Médjida, rencontré dans une rue de Lomé.

« Je l’accompagne tous les jours et je l’aide à servir les clients. Ce qui me permet surtout de mieux connaître la ville et d’être aussi aux contacts de plusieurs personnes », précise Issa qui compte démarrer son activité dans un mois.

Par ailleurs, beaucoup de ces Médjida vivent en communauté dans des maisons. Ils vivent à trois, quatre, voire cinq, dans une même chambre dans des quartiers populaires ou périphériques de Lomé, afin de se partager le loyer. FIN

Abbée DJAGLO/Rédaction