Indemnisation/Victimes non vulnérables : Le HCRRUN pose sa valise dans les Savanes

Remise de chèque à un bénéficiaire

Le Haut-Commissariat à la Réconciliation et au Renforcement de l’Unité Nationale (HCRRUN) a entamé, depuis lundi dernier, l’indemnisation des victimes non vulnérables des violences sociopolitiques de la Région des Savanes. Cette opération, qui répond à la feuille de route de la CVJR, permet au premier temps, aux victimes des préfectures de Tône, de Cinkassé, de Tandjouaré et de Kpendjal de rentrer dans leurs droits. Des droits qui constituent en fait des gestes de la part du gouvernement pour soulager, apaiser des cœurs, car personne n’est heureux tout seul et l’idéal est le vivre ensemble.

« Avançons ensemble. Qui que nous soyons, le Togo a besoin de nous tous ». C’est entre autres, le mot d’ordre de la session d’Indemnisation qu’a démarrée le Haut-Commissariat à la Réconciliation et au Renforcement de l’Unité Nationale (HCRRUN) depuis lundi pour le compte des victimes non vulnérables de la Région des Savanes.

Très impatientes à rentrer dans leurs droits, les victimes individuelles ou leurs ayants-droit, étaient nombreux à répondre à l’appel de l’initiation en charge des réparations. Bien entendu, cette région a connu des violences liées aux questions de la faune et des conflits de Barkoissi.

En effet, en six jours, des victimes des préfectures de Tandjouaré, de Cinkassé, de Tône, de Kpendjal-Est et de Kpendjal, ont été indemnisés.

Ainsi, en cette période de pandémie liée à la COVID-19, l’opération d’indemnisation, longtemps espérée, s’est déroulée sous respect scrupuleux des mesures barrières, caractérisé par le port obligatoire de masques pour toute personne, la prise de température, le lavage des mains avant l’accès aux lieux ainsi que l’observation de la distanciation dans les salles d’indemnisation.

Selon le premier et deuxième rapporteurs du HCRRUN, respectivement Dr Wiyao Evalou et Mme Claudine Kpondzo-Ahianyo, il s’agit des gestes d’apaisement et de responsabilité et le gouvernement a pris sur lui l’engagement pour reconnaître des erreurs commises.

Ce qui compte, c’est de tourner cette page sombre de l’histoire et d’œuvrer ensemble de sorte que ces actes regrettables ne se reproduisent plus.

Des témoignages poignants

Cette session d’indemnisation des victimes, couplée d’une mission d’évaluation du conflit communautaire de Barkossi (Recommandation 54 des réparations), a été vivement saluée par les bénéficiaires, qui n’ont pas manqué de mot pour exprimer leur gratitude et reconnaissance au chef de l’Etat à travers le HCRRUN.

« Je suis administrateur des biens de notre papa et ayant-droit. Après sa mort, il a été demandé de faire des dépositions à la CVJR pour toutes les victimes et J’y ai été pour le compte de mon papa. Mon papa, dans les années 58 était le représentant du mouvement des chefs traditionnels du Nord-Togo dans le canton Lodougou. A l’époque, le chef canton était du CUT et comme mon papa était du parti du progrès, il a dû représenter le mouvement des chefs traditionnels du Nord. Sa vie n’a pas été facile, puisque le CUT était au pouvoir, le vieux a été plusieurs fois victime d’arrestations et de dépositions. Il était régulièrement humilié par les « Ablodé Sodja ».

Devant ses enfants et femmes, il était humilié, trainé en prison soit à Mango où à Dapaong ici. Ce qui a plus marqué mon vieux, c’est qu’un jour, alors a invité les jeunes gens à battre le mil et à boire, on est venu le prendre devant tout ce monde, le bastonner et le ligoter en slip en sa qualité de chef du village.

Après, il a été victime de déposition et détrôné pour une raison qu’il ignore. Grâce au chef de l’Etat, feu Eyadèma, l’affaire a été clarifiée et c’est ainsi que Eyadèma avait tranché et l’a réhabilité comme chef canton jusqu’à sa mort. Nous sommes très satisfaits aujourd’hui du geste de réparation du président Faure Gnassingbé à travers HCRRUN. On ne peut même pas dire qu’il s’agit de geste symbolique.

La volonté de réparer les choses est déjà suffisante pour apaiser et nous les ayants-droit, cela va nous permettre de soigner l’image de notre papa notamment en rénovant sa maison », a souligné, les larmes aux yeux, M. Gnoatibe Dametaré.

M. Djabigue Nibeman a dit avoir été abusé par ses supérieurs à SOTOCO et licencié. Ce qui l’a traumatisé durant des années. Mais, il estime que seul Dieu est juge.

« J’ai été engagé à SOTOCO en 1976 et connu le licenciement en 1990 pour des raisons incompréhensibles car mon chef hiérarchique nous avait demandé de rembourser de nos salaires des sommes d’argent qu’il a eues à détourner.

C’est ainsi que moi, j’ai refusé. Ce licenciement a été un calvaire durant des années et c’est ainsi, aucun de mes enfants n’a évolué faute de support. Avec cet argent, c’est un soulagement pour me relancer en tant qu’agriculteur et éleveur ».

Pour Mme Kérézouwé Magnouréwa, ayant-droit, la destruction de leur maison en 2005 est un acte qu’elle dit avoir pardonné mais qu’elle ne peut oublier.

« En 2005, je vivais à Atakpamé et à l’issue de résultats de l’élection présidentielle, des individus sont débarqué chez nous, détruisant tout sur leur passage et ont tenté de nous tuer. Mes parents et moi avons fui. Ils ont cassé notre maison, détruit tous les biens. Hantés de peur, nous avons passé trois jours dans la brousse ma maman et moi. Nous avons fini par nous rendre au village à Notsè. En suite, ma cousine, venue de la Côte d’Ivoire, m’a proposé d’aller à Abidjan en vue de trouver quelque chose à faire. J’étais revenue au pays apprendre le métier de coiffure que j’exerce aujourd’hui. Ce chèque reçu va me permettre de renforcer et d’équiper mon salon de coiffure notamment en mèches et produits cosmétiques. Je suis très contente de ce geste du gouvernement par le truchement du HCRRUN. Il faut dire que j’avais perdu espoir concernant cette indemnisation mais je vois que le chef de l’Etat tient parole ».

Source : Togo Presse (Jules LEMOU)