Burkina : Zida Premier ministre, la société civile inquiète mais attend de voir

La société civile est inquiète de la nomination mercredi du lieutenant-colonel Isaac Zida au poste de Premier ministre du Burkina Faso, mais elle préfère laisser le temps au militaire de faire ses preuves, selon plusieurs de ses représentants.

« Nous sommes inquiets, mais pas plus que ça », a déclaré à l’AFP Me Guy Hervé Kam, le porte-parole du Balai citoyen, un mouvement dont les capacités de mobilisation de la jeunesse ont compté dans la chute du président Blaise Compaoré le 31 octobre.

Le lt-colonel Zida avait été porté au pouvoir par l’armée le 1er novembre, « pour conduire la transition », et il est resté l’homme fort du pays jusqu’à la nomination du président civil Michel Kafando lundi.

« Je ne suis pas dans la dynamique de juger des gens qui n’ont pas posé d’action », a déclaré Sams’K le Jah, chanteur et co-fondateur du Balai citoyen, pour qui le fait que M. Zida devienne Premier ministre ne pose pas de problème en soi.

Thomas Sankara « a été militaire, pourtant il a travaillé pour ce pays », a-t-il observé. « A l’inverse, des civils ont été pires que des militaires ».

Sankara, président révolutionnaire idéalisé au Burkina Faso, resté 4 ans au pouvoir de 1983 à 1987, avait été renversé et tué dans un coup d’Etat organisé par son frère d’armes Blaise Compaoré.

« Il va falloir voir dans quelle mesure cette nomination est de nature à changer l’orientation de la transition », a commenté Siaka Coulibaly, politologue et membre de la société civile.

La charte de transition, la constitution intérimaire, votée par armée et civils et entérinée samedi, n’a pas défini les attributions du président et du Premier ministre, a-t-il observé.

« On ne sait donc pas si le Premier ministre est un fusible, protocolaire, ou s’il aura véritablement du pouvoir », a analysé M. Coulibaly.

Le lt-colonel Zida a été nommé mercredi par le président intérimaire Michel Kafando, qui était lui-même l’un des candidats de l’armée au poste de chef de la transition.

« Quand vous regardez le contexte burkinabè, les militaires ont tenu le pouvoir pendant tellement longtemps qu’on ne peut pas démilitariser le pays du jour au lendemain », a estimé Fernand Sanou, un sociologue de l’université de Ouagadougou.

Le lt-colonel Zida a « montré des compétences » durant ses trois semaines au pouvoir, a jugé M. Sanou. « Il faut que les gens aient de la patience. »Après son indépendance en 1960, la Haute-Volta (devenu Burkina Faso en 1984) a connu une série de coup d’Etat militaires à partir de 1966.

SOURCE :AFP