Burkina: L’activité reprend timidement à Ougadougou où le projet de sortie de crise est décrié

La capitale du Burkina Faso, Ouagadougou, où l’accès à internet était quasi-inaccessible, avait repris un semblant de normalité lundi, au lendemain de l’annonce du projet de sortie de crise présenté par la médiation ouest-africaine et critiqué par la société civile, ont constaté des journalistes de l’AFP.

Les magasins étaient ouverts et des centaines de moto-taxis circulaient dans le centre-ville, où des journalistes de l’AFP n’ont pas vu de présence militaire, contrairement aux jours précédents. De même, les marchés de Baskuy et Larlé dans le centre-ville étaient bondés. Toutefois, les stations-service, les banques, les supermarchés et les administrations demeuraient fermés.

Dimanche soir, la médiation de la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (Cédéao) a annoncé un « projet d’accord politique de sortie de crise » prévoyant notamment la participation aux élections des candidats de l’ancien régime de Blaise Compaoré, chassé par la rue en octobre 2014, et l’amnistie des putschistes.

Dès l’annonce de ce projet, des leaders de la société civile et de l’ancienne opposition à Compaoré avaient exprimé leur colère, jugeant pour les premiers le projet « honteux ».

Lundi matin, des habitants de Ouagadougou qui faisaient la queue pour acheter des unités d’électricité à l’agence principale de la compagnie nationale, la Sonabel, se montraient également très critiques et promettaient de nouvelles manifestations.

« On n’a plus confiance dans la Cédéao. On veut sortir (dans la rue), prendre notre destin en mains. Les corps (des manifestants tués) ne sont même pas enterrés et on amnistie. On va tout barricader », a déclaré à l’AFP Adama Traoré, un agent de bureau âgé d’une trentaine d’années.

« On prend de l’électricité parce qu’on a peur pour les prochains jours. On ne sait pas ce qui va se passer. On va payer l’électricité et sortir manifester. On n’est pas d’accord: on ne peut pas tuer la population. On va marcher, bloquer les quartiers », a-t-il ajouté.

« L’accord de la Cédao n’est pas une bonne solution », a renchéri Issouf Ouédraogo, 25 ans, critiquant l’amnistie prévue dans l’accord pour les putschistes: « Les décédés, c’est cadeau », dit-il faisant allusion à l’impunité promise aux putschistes, qui n’ont pas hésité à tirer sur la foule.

Selon un dernier bilan hospitalier samedi, les violences qui ont accompagné le coup d’Etat ont fait au moins 10 morts et 113 blessés.

A Ouagadougou, l’accès à internet était quasi-inaccessible et plusieurs réseaux de téléphonie mobile étaient coupés. Les appels à manifester via les réseaux sociaux avaient joué un rôle prépondérant dans l’organisation du soulèvement populaire qui avait mis fin aux 27 ans de pouvoir de Blaise Compaoré, fin octobre 2014.

« Ils essaient d’empêcher les gens de communiquer », commentait Issouf Ouédraogo.

SOURCE : AFP