
L’Union africaine (UA) a salué samedi à son tour la signature d’un accord de paix entre le Rwanda et la RDC comme une étape importante» pour mettre fin au conflit dans l’est de ce pays, où des habitants interrogés par l’AFP se montrent dubitatifs.
Cette région riche en minerais est en proie aux conflits depuis plus de 30 ans et de précédents accords de paix et cessez-le-feu ont été conclus puis violés ces dernières années.
Le texte a été formellement signé vendredi sous les auspices des Etats-Unis lors d’une cérémonie à Washington, en présence du secrétaire d’Etat américain Marco Rubio et de ses homologues de la RDC et du Rwanda, Thérèse Kayikwamba Wagner et Olivier Nduhungirehe.
Le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres a rapidement évoqué une «étape importante vers la désescalade, la paix et la stabilité».
Le président de la Commission de l’UA, Mahamoud Ali Youssouf, s’est à son tour félicité samedi «de cette étape importante et a salué tous les efforts visant à faire progresser la paix, la stabilité et la réconciliation dans la région». Il a également souligné «le rôle constructif» des Etats-Unis.
De son côté, le président américain Donald Trump a salué «un nouveau chapitre d’espoir».
«Aujourd’hui, la violence et la destruction prennent fin et toute la région entame un nouveau chapitre d’espoir et d’opportunités, d’harmonie, de prospérité et de paix».
«C’est un jour merveilleux», a-t-il ajouté après la signature de l’accord qui doit également déboucher, selon lui, sur l’obtention par les Etats-Unis de droits miniers en RDC.
Premier producteur mondial de cobalt, le pays détient aussi, dans les sous-sols de sa partie orientale, d’importantes réserves de coltan, minerai stratégique pour l’industrie électronique.
«Nous avons vraiment souffert»
Le groupe armé M23, soutenu militairement par le Rwanda selon l’ONU et les Etats-Unis, s’est emparé au début de l’année de pans entiers de l’est congolais, notamment des grandes villes de Goma et Bukavu, proches des frontières rwandaises.
Les affrontements ont fait des milliers de morts, déplacé des centaines de milliers de personnes et provoqué une vaste crise humanitaire.
Le front est stabilisé depuis février, mais les combats se poursuivent entre le M23 et une myriade de milices locales plus ou moins autonomes, qui mènent des actions de guérilla.
De plus, Human Rights Watch a accusé début juin le M23 d’exécutions sommaires de civils dans les zones occupées, avec notamment des rafles menées dans Goma.
Dans ce poumon économique de l’est congolais, qui borde la frontière rwandaise, Adeline Furaha, une habitante, voit dans l’accord une «lueur d’espoir quant au retour tant attendu de la paix».
«J’espère que mes frères et sœurs qui ont fui Goma pourront rentrer maintenant. Les deux pays qui s’accusent mutuellement dans cette guerre comprennent que nous avons vraiment souffert», ajoute cette entrepreneure.
De son côté, Lionel Mapendo affirme que les populations des «zones occupées» par le M23 ressentent «une frustration mélangée à une déception».
«On croyait voir les troupes du M23 libérer les zones occupées juste au lendemain de ces signatures, mais hélas, on dirait que ce sont juste des accords commerciaux pour les minerais», ajoute-t-il.
Le prix Nobel de la Paix et candidat à la présidentielle congolaise de 2024 Denis Mukwege a dénoncé un accord qui selon lui «légitimise le pillage des ressources naturelles congolaises» et «récompense l’agression».
«Encore attendre»
L’accord de paix prévoit des dispositions sur «le respect de l’intégrité territoriale et l’arrêt des hostilités» dans l’est de la RDC. Mais il n’aborde pas explicitement les gains territoriaux du M23. Ce dernier, comme les milices locales qu’il combat, n’a jamais officiellement reconnu les précédents cessez-le-feu.
Kigali affirme que sa sécurité est depuis longtemps menacée par des groupes armés, notamment les FDLR, créées par d’anciens dirigeants hutus liés au génocide rwandais de 1994 et installés depuis en RDC.
«La première chose à faire est de commencer à mettre en œuvre le concept d’opérations pour la neutralisation des FDLR, qui s’accompagnera d’une levée des mesures défensives du Rwanda», a déclaré le chef de la diplomatie rwandaise, Olivier Nduhungirehe.
A Goma, certains habitants s’interrogent sur le temps que prendra la mise en application de l’accord.
«Je ne suis pas satisfait de cet accord car cela ne vient pas soulager directement notre misère, déclare à l’AFP Roland Mumbere, militant de la société civile à Goma.
«On devra encore attendre longtemps pour voir cette crise prendre réellement fin». FIN
Source : AFP