Afrique : la cheffe des droits de l’homme de l’ONU fustige la récente vague de coups d’Etat

NEW YORK, USA, Le 10 Mars 2022 -/African Media Agency(AMA)/-La cheffe des droits de l’homme de l’ONU a dénoncé mardi la récente vague de coups d’Etat sur le continent africain, exhortant les gouvernements à renforcer « la crédibilité des institutions démocratiques ».

S’exprimant devant le Conseil des droits de l’homme de l’ONU, la Haute-Commissaire aux droits de l’homme, Michelle Bachelet, a condamné « la série de changements de pouvoir anticonstitutionnels » survenus récemment dans plusieurs pays du continent africain.

« Ces coups d’Etat ont de graves répercussions sur la stabilité des institutions, des sociétés et – au-delà des frontières nationales – dans la région au sens large », a dit par vidéo Mme Bachelet.

Détaillant cette récente vague de putschs, l’ancienne Présidente chilienne s’est notamment inquiétée de la situation au Mali où « il est essentiel d’assurer une transition rapide vers la démocratie et un retour complet à l’ordre constitutionnel ». Cette nouvelle donne d’un pouvoir militaire a conduit également à « un rétrécissement de l’espace civique et du débat démocratique ».

Michelle Bachelet regrette l’impact « des sanctions sur les Maliens ordinaires »

Sur le plan sécuritaire, malgré « une légère réduction du nombre d’incidents sécuritaires » au cours du dernier trimestre de 2021 par rapport au trimestre précédent, l’environnement sécuritaire dans le pays reste précaire. Les services de Mme Bachelet ont fait état de la poursuite des attaques contre les civils par des groupes extrémistes violents, des groupes armés communautaires et des milices.

Les disparitions forcées ou les enlèvements documentés par l’ONU ont plus que doublé en 2021, pour atteindre 775 cas. Le Haut-Commissariat de l’ONU aux droits de l’homme (HCDH) pointe du doigt « les graves violations du droit international des droits de l’homme et du droit humanitaire » commises par les forces de défense et de sécurité, notamment celles engagées dans l’« Opération Keletigui ».

« Mon Bureau enquête sur un certain nombre d’allégations à Diabaly et ailleurs », a fait valoir Mme Bachelet.

Sur un autre plan, elle a regretté l’impact « des sanctions sur les Maliens ordinaires » et « la tension persistante entre les autorités et plusieurs partenaires régionaux et internationaux ». Dans ces conditions, elle a appelé les autorités à Bamako à travailler de manière constructive avec leurs partenaires régionaux et internationaux pour faire avancer les droits du peuple malien.

Le coup d’État au Burkina Faso reste un « revers »

S’agissant du récent coup d’État au Burkina Faso, Mme Bachelet évoque un « revers », qui pourrait « compromettre gravement » les progrès en matière de droits de l’homme.

« Je demande instamment le retour rapide à l’État de droit et à la démocratie constitutionnelle, dans le plein respect des droits et libertés de tous les Burkinabés », a dit la Haute-Commissaire, invitant les autorités de transition à « respecter les engagements pris par le pays en vertu du droit international des droits de l’homme ».

Ce changement constitutionnel est intervenu alors que « la situation sécuritaire, en particulier dans la zone des trois frontières entre le Mali, le Niger et le Burkina Faso, est alarmante ».

Sur le terrain, les services de Mme Bachelet continuent à documenter des violations des droits humains par les forces de sécurité, ainsi que des abus et des attaques par des groupes armés.

Sur le plan humanitaire, le conflit a déplacé 2,5 millions de personnes au cours des dix dernières années. Les mouvements de populations sont aggravés par « la pénurie de ressources, en particulier la pénurie d’eau », qui aggrave souvent les tensions, notamment entre les agriculteurs et les éleveurs. Des tensions sont exploitées par des groupes extrémistes violents.

Renforcer la « crédibilité » des institutions démocratiques

Au Tchad, le HCDH continue d’aider à la mise en œuvre de la feuille de route pour « la transition démocratique » du nouveau régime, qui a pris le pouvoir après la mort du président Idriss Deby en avril 2021. Un dialogue national, qui a été reporté à plusieurs reprises, devrait maintenant avoir lieu en mai de cette année.

Mais pour l’ONU, la feuille de route de la transition doit être ancrée dans les droits humains, afin d’éviter toute discrimination. Il s’agit surtout de remédier aux inégalités et de garantir l’inclusion, notamment des minorités ethniques et religieuses, des femmes, des jeunes, des syndicats et des acteurs de la société civile, tant dans les zones urbaines que rurales. L’objectif est de permettre « un véritable dialogue au Tchad ».

Face à cette multiplication de coups d’Etat en Afrique, notamment au Mali, Soudan, Guinée, Burkina Faso et au Tchad, l’ONU estime qu’un gouvernement démocratique reste le moteur important du développement durable et des droits. Une façon de rappeler l’importance des institutions largement considérées comme légitimes qui travaillent à « résoudre les griefs, à diminuer la corruption et à prévenir les tensions et les conflits sociaux ».

Mme Bachelet a donc exhorté les gouvernements « à renforcer la crédibilité des institutions démocratiques, ainsi que la responsabilité et l’indépendance d’institutions clés telles que le système judiciaire et les institutions nationales des droits de l’homme ».

Les graves répercussions de trois crises distinctes et simultanées au Cameroun

Dans ce tour d’horizon de la situation en Afrique subsaharienne, la cheffe des droits de l’homme s’est également penchée sur les graves répercussions de trois crises distinctes et simultanées au Cameroun.

La multiplication des attaques de groupes armés séparatistes dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, les affrontements interethniques et les attaques de la milice Boko Haram dans l’Extrême-Nord et, dans la région de l’Est, les retombées de la crise en République centrafricaine entraînent toutes de « graves violations des droits de l’homme et des abus à l’encontre des civils ».

Dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, des centaines de milliers de personnes vivent dans la « crainte constante » d’attaques ou d’opérations anti-insurrectionnelles, ainsi que de représailles exercées à leur encontre par toutes les parties en raison de leur soutien supposé à des adversaires. L’utilisation croissante d’engins explosifs improvisés par les groupes armés séparatistes a tué et blessé de nombreux civils, en particulier des enfants.

« Les attaques incessantes des groupes armés contre les travailleurs humanitaires et le personnel des Nations unies entravent l’acheminement de l’aide », a déploré Mme Bachelet, s’alarmant de « rapports faisant état de graves violations commises par les forces de sécurité camerounaises et qui doivent faire l’objet d’une enquête ».

Distribué par African Media Agency (AMA) pour ONU Info.

 

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