Sommet: A Paris, trouver 100 milliards pour éviter le décrochage économique de l’Afrique

Le président français Emmanuel Macron a ouvert mardi un sommet international consacré à la relance économique de l’Afrique, avec l’ambition de mobiliser au moins 100 milliards de dollars pour que le continent puisse se relever de la pandémie, mais aussi lutter contre le terrorisme.

Ce « sommet de l’urgence et de l’ambition » vise à combler au moins en partie le « besoin de financement de l’Afrique d’ici 2025, estimé à 285 milliards de dollars », a déclaré le chef de l’État à son arrivée au Grand palais éphémère, édifié sur le Champ-de-Mars au pied de la Tour Eiffel.

Mais pour éviter d’alourdir le fardeau de la dette, Emmanuel Macron a proposé « une nouvelle donne », passant à la fois par la mobilisation de l’investissement privé et le recours à un instrument financier peu utilisé, les droits de tirage spéciaux (DTS) du Fonds monétaire international.

Équivalent à une planche à billets du FMI, ces actifs monétaires peuvent être convertis en devises par les pays et dépensés, sans créer de dette.

Jusqu’à présent, la communauté internationale s’est accordée sur le principe d’une émission globale de DTS de 650 milliards de dollars, dont 33 milliards devaient revenir mécaniquement à l’Afrique, par le jeu des quotes-parts au sein de l’institution de Washington.

Trop peu en regard des besoins de financement du continent qui a besoin d’investir massivement pour enrayer la pauvreté, développer les infrastructures, affronter le changement climatique et la menace jihadiste.

« Nous défendons l’idée que les pays aisés puissent réallouer leurs DTS pour qu’ils aillent vers les pays pauvres, en particulier l’Afrique, pour que les 33 milliards d’aujourd’hui deviennent 100 milliards », a expliqué le président Macron. Un objectif sur lequel les dirigeants africains invités lundi à l’Élysée sont tombés d’accord, tout en estimant que ce ne serait pas suffisant, a relevé le président de la République démocratique du Congo (RDC), Felix Tshisekedi.

La secrétaire américaine au Trésor Janet Yellen, qui participe au sommet en visioconférence, s’est déclarée favorable à cette option dans un communiqué, sous réserve que l’usage des fonds soit « transparent et responsable ».

– Charge sécuritaire –

Ce « Sommet sur le financement des économies africaines » est un « moment très important, nous sommes réunis pour inverser un processus de divergence, qui est très dangereux, entre les économies avancées et les pays développés, en particulier l’Afrique », a déclaré la directrice générale du FMI, Kristalina Georgieva.

« Nous devons revenir au fort rythme de développement que l’Afrique connaissait avant le Covid, il le faut pour l’Afrique et pour le reste du monde ».

Car le PIB continental devrait progresser de « seulement 3,2% cette année », quand la croissance mondiale devrait accélérer à 6%.

Un moratoire sur les intérêts de la dette, mis en place en avril 2020 par le G20, a permis de donner un peu d’air au pays africains les plus endettés, mais « cette pandémie a laissé nos économies exsangues car nous avons dû consacrer le peu de moyens que nous avions à combattre la maladie », a témoigné Félix Tshisekedi, qui assure la présidence tournante de l’Union africaine.

Le FMI a calculé que les économies avancées ont consacré près de 25% de leur richesse nationale à des plans de relance post-Covid, une proportion qui tombe à 2% pour le continent.

Or, en plus de la pandémie, une « charge de sécurité repose sur l’Afrique », devenue le nouvel « épicentre » du terrorisme, a averti Emmanuel Macron, jugeant « impérieux d’actualiser les règles financières en prenant en compte » ces coûts.

A côté des DTS, la communauté internationale devrait mobiliser des moyens plus classiques, comme les plans d’aide, bilatéraux ou multilatéraux, orchestrés par les organisations internationales, sous condition de réformes.

Le FMI a par exemple confirmé la mise à disposition de 240 millions de dollars pour le Togo, a annoncé son président.

« Le sommet vise à poser les bases d’un nouveau cycle de croissance en Afrique », a déclaré mardi Faure Gnassingbé.

Selon lui, « l’appui au secteur privé africain » sera également décisif pour un continent qui aspire à sortir de la logique de l’assistance mais qui butte encore sur la défiance des investisseurs.

SOURCE : AFP