Sommet de Lomé: Très fermes, les sept pays veulent criminaliser le trafic de faux médicaments (REPORTAGE)

Les trois chefs d'Etat, lors du sommet

Les sept pays africains au sommet de Lomé ce samedi sur la lutte contre le trafic de faux médicaments, ont affiché leur fermeté de venir à bout du fléau, en criminalisant le trafic à travers leurs différentes juridictions.

Ont pris part à cette rencontre de haut niveau : Les présidents Faure Gnassingbé du Togo, Macky Sall du Sénégal, Yoweri Museveni de l’Ouganda, ainsi que les ministres de la santé du Congo-Brazzaville, du Ghana du Niger et de la Gambie.

Plusieurs autres personnalités dont le directeur de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), étaient présentes à cette initiative de Lomé, appuyée par la Fondation Brazzaville.

Ce sommet devrait aboutir à la signature d’un « accord-cadre légalement contraignant » visant à lutter efficacement contre le trafic des faux médicaments ou produits médicaux de qualité inférieurs et falsifiés.

Pour cette première rencontre, les sept pays africains ont pris l’engagement — à travers une déclaration — de signer l’accord-cadre qui va les engager à introduire dans leurs juridictions respectives « des lois et sanctions pénales pour criminaliser le trafic des produits médicaux de qualité inférieurs et falsifiés et à coopérer pour assurer le respect de ces lois et leur application rigoureuse ».

Cet accord-cadre les engagera également « à mettre en place les mécanismes nécessaires pour garantir » la mise en œuvre de l’Initiative de Lomé.

Les sept pays africains ont invité la Fondation Brazzaville à continuer à les accompagner dans la mise en œuvre des structures et des outils juridiques permettant la réalisation de cet accord.

« Reconnaissons que la signature de cet accord participe à une immobilisation plus large pour améliorer l’accès à des médicaments qui ne portent pas atteinte à la santé de nos concitoyens, nous nous engageons résolument à conjuguer nos efforts, au-delà de cet accord, par des mesures et actions nécessaires », souligne la déclaration.

Ils invitent les autres pays africains à rejoindre cette initiative et appellent à l’intensification des efforts déployés au niveau national, régional et international pour lutter contre ce fléau.

Chaque année, on estime à 200 milliards de dollars, la valeur du marché illégal des médicaments non conformes aux normes et falsifiés, soit environ10 à15% du marché pharmaceutique mondial.

En 2015, 122.000 enfants de moins de 5ans seraient morts à cause d’antipaludiques de mauvaise qualité en Afrique subsaharienne. On estime que 128 pays dans le monde sont touchés par les médicaments falsifiés.

Environ 42% de tous les médicaments falsifiés découverts, depuis 2013, l’ont été en Afrique. Dans certains pays africains, on estime que les médicaments falsifiés représentent 30 à 60% de tous les produits médicaux.

 

L’initiative de Lomé réveillera la conscience des nations

 

« Ce jour est important, enfin, car notre initiative réveillera la conscience des nations et convaincra la communauté internationale de nous suivre, en s’engageant à son tour », a souligné le président togolais, invitant les autres États du continent, l’Union Africaine et demain les Nations unies à rejoindre l’Initiative de Lomé.

Selon Faure Gnassingbé, « il y a urgence, car le trafic des produits médicaux falsifiés tue aujourd’hui un million de personnes par an dans le monde, particulièrement en Afrique ».

« Qui pourrait tolérer que plus de 120.000 enfants de moins de cinq ans perdent la vie chaque année à cause des médicaments falsifiés censés les guérir ? L’ampleur du trafic est telle que, selon l’Organisation Mondiale de la Santé, la proportion de faux médicaments représenterait sur notre continent 60% des produits médicaux en circulation. S’il y a urgence à agir en faveur du climat et de l’environnement, ne perdons pas de vue qu’il y a une extrême urgence à sauver des millions de vies menacées par les faux médicaments », a-t-il précisé.

Ce danger, a poursuivi le président togolais, « n’est pas simplement une menace, mais une réalité à laquelle nos peuples sont tout particulièrement confrontés chaque jour ».

« II y a urgence car ce trafic international, dirigé par des organisations criminelles, se développe de façon exponentielle. Qu’on en juge : de 75 milliards de dollars US en 2010, le chiffre d’affaires du trafic des produits médicaux falsifiés est évalué â 200 milliards de dollars en 2014, presque le triple en quatre ans. Les bénéfices tirés de ce trafic sont supérieurs à celui de la drogue ou des armes. À cette rentabilité financière sans équivalent s’ajoute un risque très faible et une quasi-impunité », a-t-il ajouté.

Notons que le Togo est l’un des pays pionniers à avoir modifié son code pénal dès 2015. La peine encourue par les trafiquants y est désormais de 20 ans de prison et de 50 millions de francs CFA d’amende (76.200 d’euros).

En juillet, 67,8 tonnes de produits pharmaceutiques contrefaits, saisis entre juin 2018 et juin 2019, ont été brûlés à Lomé. Une saisie record de 200 tonnes de faux médicaments a été réalisée mi-novembre à Abidjan par la gendarmerie ivoirienne et quatre suspects, dont un ressortissant Chinois, ont été arrêtés. FIN

 

Junior AUREL