Gilbert Bawara: « Dans les prochains jours, le gouvernement adoptera et soumettra à l’Assemblée nationale un projet de révision constitutionnelle »

Gilbert Bawara, ministre de la fonction publique.

La Commission électorale nationale indépendante (CENI) a annoncé mardi lors d’une conférence de presse, la tenue de trois élections en décembre prochain: le référendum et les locales le 16 décembre et les législatives le 20 décembre.

Prof. Kodjona Kadanga, (président de ladite Institution) a même rassuré les populations: « Techniquement, nous sommes prêts pour faire face à ces scrutins. Les kits de recensement, on en a suffisamment, sans oublier  les risques majeurs. Je pus vous rassurer que nous avons le matériel électoral suffisant, ainsi que les ressources humaines. A notre niveau, aucun problème ne se pose ».

Mais, cette annonce a surpris beaucoup de togolais et les commentaires et réactions se sont multipliés notamment sur les médias privés et des réseaux sociaux.

« Nous ne nous retrouvons pas dans ce processus. C’est nul et non avenu », a commenté Aimé Gogué, président de l’Alliance des Démocrates pour le Développement Intégral (ADDI, parti membre de la coalition de l’opposition) sur une radio privée.

« Ce que nous voulons, c’est la résolution de la crise togolaise. Nous croyons toujours à la Cédéao et aux facilitateurs. Nous attendons qu’ils viennent pour résoudre le problème de chronogramme et de la Céni notamment et les autres réformes qui vont suivre », a-t-il ajouté.

Pour Me Dodji Apévon, président des Forces Démocratiques pour la République (FDR, également membre de la coalition de l’opposition) sur un autre média privé: « tout ça, est une bêtise (…) C’est une course effrénée pour tomber dans l’abîme ».

Face aux réactions suscitées par la publication du chronogramme de ces élections par la CENI, le ministre de la fonction publique Gilbert Bawara, a dans une interview accordée à l’Agence Savoir News, apporté des « clarifications et précisions » et « rassuré les Togolais concernant la volonté de mise en œuvre intégrale et scrupuleuse de la feuille de route de la CEDEAO ».

Selon lui, « il ne sert à rien de continuer à entretenir des polémiques et des débats stériles sur des sujets qui n’en sont pas un ».

« Pour le gouvernement, la feuille de route et les décisions et recommandations de la CEDEAO seront appliquées et mises en œuvre de manière globale et intégrale, et non de manière sélective aussi bien sur le fond que sur la forme. De manière spécifique, les réformes constitutionnelles seront réalisées et elles le seront de préférence par voie parlementaire comme cela a été préconisé par les chefs d’État et de gouvernement lors du sommet du 31 juillet dernier », a-t-il précisé.

Un « projet de révision constitutionnelle » les prochains jours

Dans la feuille de route de la CEDEAO, les chefs d’État ont recommandé l’adoption des réformes «par voie parlementaire en vue d’accélérer le processus de leur mise en œuvre. Le cas échéant, ces réformes seront soumises aux consultations électorales ». Le gouvernement entend bien respecter cette disposition, a rassuré le ministre.

« Dans les prochains jours, le gouvernement adoptera et soumettra à l’Assemblée nationale un projet de révision constitutionnelle. Cela ouvrira la voie au débat démocratique au sein de la représentation nationale, et nous espérons que l’esprit de responsabilité prévaudra afin que cette réforme soir votée et adoptée par les députés. Le référendum constitue une option ultime qui n’aura de pertinence et de sens qu’en cas de blocage ou d’échec du débat et du vote à l’Assemblée nationale », a indiqué Gilbert Bawara.

A travers l’expert constitutionnaliste en cours de déploiement, a-t-il poursuivi, « la CEDEAO aura la possibilité d’apprécier la conformité du projet de révision constitutionnelle par rapport aux décisions des chefs d’État et par rapport aux normes et aux pratiques régionales et internationales ».

 

La feuille de route et les décisions de la CEDEAO « s’imposent à tous »

 

Le ministre Bawara a profité pour rappeler que la feuille de route et les décisions de la CEDEAO s’imposent à tous, aussi bien aux acteurs politiques qu’au gouvernement et aux autres institutions de la République notamment les structures et organes chargés de la gestion des élections : « C’est donc à bon droit et sans doute en s’appuyant sur la feuille de route que la CENI a adopté un chronogramme global des élections, en y incluant l’éventualité d’un référendum. Du reste, les élections locales ne font pas partie de la feuille de route, mais la concrétisation de la décentralisation est attendue par tous les bords politiques et par nos concitoyens et nos partenaires extérieurs ».

« Il se comprend aisément que des raisons de bon sens et des motifs liés à la rationalisation et à l’optimisation du calendrier politique et électoral et des ressources financières imposent un couplage de certaines consultations électorales. Pour ce qui est du processus électoral, le gouvernement s’est déjà prononcé à maintes reprises. Dès le lendemain du sommet du 31 juillet dernier, nous avons exprimé publiquement et expressément la disponibilité et la volonté du gouvernement à œuvrer avec la coalition des 14 et les autres partis politiques pour favoriser une mise en œuvre concertée et consensuelle de la feuille de route. Cette disponibilité et cette volonté d’ouverture demeurent. Plus spécifiquement, nous nous sommes exprimés favorablement concernant les préoccupations de la coalition à propos de la CENI et de ses démembrements. Il suffirait donc de se retrouver pour échanger sans formalisme sur ces préoccupations et pour parvenir à des solutions satisfaisantes, le souci étant de garantir des élections équitables, crédibles et transparentes, et de promouvoir et assurer la confiance de tous les acteurs dans le processus électoral », a-t-il longuement expliqué.

Les débats sur la CENI est un « non-sujet qui n’a pas lieu d’être »

Dans ces conditions, a précisé le ministre, « les débats sur la CENI est un non-sujet qui n’a pas lieu d’être, sauf de la part de ceux qui sont dans une logique de blocage et qui croient pouvoir prendre le processus en otage ».

Les leaders de la coalition des 14 partis politiques de l’opposition exigeaient notamment la recomposition de la CENI et un « chronogramme sérieux » pour les législatives, avant l’annonce des deux autres scrutins (les locales et le référendum). Cette position n’est pas du goût du parti au pouvoir et de certains responsables des partis extra-parlementaires, déjà représentés au sein de cette commission électorale, qui mène ses activités depuis le 20 octobre 2017.

La CENI fonctionne à 13 membres (au lieu de 17), l’opposition parlementaire (notamment les partis membres de la coalition) ayant refusé d’envoyer leurs quatre représentants.

Poursuite des mesures d’apaisement: 10 personnes remises en liberté mercredi soir

« Nous n’avons pas non plus attendu des interventions extérieures et des injonctions de la CEDEAO pour poursuivre les mesures de décrispation. Une vingtaine de détenus a déjà été libéré, dont 10 sont déjà libres ce soir », a indiqué M.Bawara.

« J’espère que la coalition n’accusera pas le gouvernement d’avoir intensifié les mesures d’apaisement et de décrispation de manière unilatérale ! Si l’on devait céder aux desideratas de la coalition des 14 partis de l’opposition, ces concitoyens qui ont recouvré la liberté ne devraient pas l’être avant de s’en être référé au préalable aux facilitateurs », a souligné le ministre.

Et pour conclure l’entretien, M.Bawara interrogé sur les réunions dont certains médias parlent, a déclaré: « pour le moment le gouvernement n’a pas encore été saisi d’une réunion quelconque hors du territoire. Si nous étions saisis, par les canaux et dans les délais appropriés, nous aviserons ». FIN

Junior AUREL