Effritement de la coalition et sortie en solo du PNP : Quelle première leçon ? (PAPIER D’ANGLE)

Des forces de l'ordre dans les rues de Lomé samedi 13 avril 2019.

La coalition de l’opposition, qui a fait trembler le pouvoir avec de gigantesques manifestations notamment entre septembre, octobre, novembre et décembre 2017, s’est effritée ces dernières semaines, totalement vidée de ses « poids lourds ».

La C-14 devient la « C-7 » : 7 des 14 partis politiques dont l’Alliance nationale pour le changement (ANC), le Parti national panafricain (PNP) et le Comité d’Action pour le Renouveau (CAR) ont claqué la porte de ce regroupement, miné par la guerre de leadership. A cela s’est ajoutée l’affaire des 30 millions de francs CFA, don d’un chef d’État de la sous-région aux leaders de ce regroupement.

Le reste du groupe décide de garder la « maison », au moment où ceux qui ont claqué la porte tentent de mener en solo leurs activités sur le terrain : L’ANC était en meeting dimanche à Atakpamé (environ 175 km au nord de Lomé), rencontre animée par Jean Pierre Fabre (ex-chef de file de l’opposition et président de cette formation politique).

Samedi, les militants et sympathisants du PNP étaient au « front », à l’appel des premiers responsables de ce parti: une grande première, après son départ de la coalition.

Le PNP a prévu des marches à Lomé et dans 10 villes à l’intérieur du pays. Mais seules trois villes ont été retenues par le ministre de l’administration territoriale Payadowa Boukpessi : Lomé, Sokodé et Afagnan.

A Lomé, deux itinéraires sont notifiés aux responsables du PNP et tout est confiné dans la zone de Togblékopé. Ce qui n’est pas du goût des responsables du PNP, qui ont maintenu leur position.

Alors, aucun rassemblement à Lomé samedi : les points de départ étant très tôt bouclés par des forces de l’ordre. Certains ont dressé des barricades dans la zone d’Agoè, mais ils ont été dispersés aux gaz lacrymogènes. Les forces de l’ordre ont lancé à plusieurs reprises, des gaz lacrymogènes pour disperser les jeunes. Sokodé et Bafilo ont été également théâtre d’affrontements entre manifestants et forces de l’ordre.

« Le bilan est lourd: officiellement un mort. Monsieur Ziedhine Traoré, militant PNP résidant dans la ville de Bafilo, battu à mort par des militaires, des dizaines de blessés et des arrestations (…) La résidence de Monsieur Tikpi Atchadam, Président du PNP, a été vandalisée par des militaires », a dressé le PNP dans un communiqué rendu public.

Selon certains observateurs avertis, la tension était trop forte la veille des manifestations.

« Le pouvoir n’entend plus revivre un autre 19 août. C’est un chat échaudé, il est sur ses gardes. Donc tous les moyens ont été déployés pour casser le mouvement. Le PNP de son côté, voulait relever un double défi : montrer ses muscles face à l’autorité, car +trop c’est trop+et montrer aussi à ses +amis d’hier+ (coalition), qu’il peut bien tenir seul », a commenté Alain Edouh, professeur de droit dans une université privée.

A en croire ce dernier, il sera très difficile – dans le contexte actuel – pour un seul parti politique de l’opposition, d’affronter le pouvoir qui est sur le qui-vive.

« Seule l’union d’actions de l’opposition peut nous sortir des difficultés. Si on le sait et on décide de détruire ce qu’on a en commun pour des actions hasardeuses, ça n’apportera rien du tout », a martelé dimanche sur radio Pyramide Me Dodji Apévon (président des FDR).

« Tous les togolais le disent : aucun parti – quel qu’il soit – ne peut régler tout seul le problème que nous avons aujourd’hui contre ce régime. Tout le reste, c’est de la fanfaronnade », a-t-il soutenu.

Par ailleurs, ce dernier n’a pas manqué de condamner la manière dont le pouvoir a réprimé les manifestations samedi dernier.

Le PNP exige notamment « l’application » de la feuille de route de la Cédéao, notamment les réformes constitutionnelles et institutionnelles, la libération des personnes toujours en détention dans le cadre des manifestations. Selon des responsables de l’opposition, une soixantaine de personnes seraient encore dans les prisons du pays. FIN

Edem Etonam EKUE