Dans les restaurants et grands hôtels de Lomé, les produits locaux peu à peu dans les habitudes (MAGAZINE)

C’est l’habitude dans la plupart des grands hôtels de la place, de ne manger en priorité que des mets étrangers : de l’entrée jusqu’au dessert. Même les boissons et autres jus, sont parfois des breuvages inconnus du territoire. Pourtant, le programme national d’investissement agricole et de sécurité alimentaire (PNIASA) lancé depuis 2011 par le gouvernement togolais avec un montant d’environ 569 milliards reparti sur cinq ans a permis au Togo d’augmenter considérablement sa production agricole surtout en céréales ces dernières années.

Selon certains, les produits étrangers sont plus raffinés et esthétiques. Pour d’autres, les produits locaux sont à peine emballés et vite dégradables.

La plupart des restaurants et grands hôtels de la capitale utilisent les produits importés, pour la confection des menus. Mais beaucoup estiment que les produits locaux ne sont pas suffisamment valorisés, et les hôtels doivent contribuer à vendre la destination Togo à travers leur carte-menu.

Que servent les hôtels de la capitale et comment valoriser les mets locaux : les +chefs+ se prononcent

« Pour le moment, nous ne présentons pas encore de produits locaux au menu, mais nous y pensons. Actuellement, les spécialités locales ne sont proposées qu’aux buffets. C’est assez difficile de proposer les produits locaux aux clients. Nous, nous avons bénéficié d’une formation organisée par OADEL, sur l’utilisation des produits locaux dans nos créations de menus et je pense que cela se fera progressivement », déclare Goune Namedougui (chef cuisinier à Hôtel La Savoureuse).

« Le constat est que les produits européens sont ancrés dans les habitudes, et je crois que l’insertion de nos produits doit être progressive. Il faut toute une organisation, afin que les gens puissent apprécier nos produits et s’y habituer … », suggère-t-il.

Même constat à Agla Hôtel, où les produits locaux ne sont pas toujours servis. « Nous ne les servons que rarement. Cela dépend aussi des clients qui fréquentent nos hôtels, et je pense qu’il faudra aussi y réfléchir. Les clients congolais, ivoiriens,… réclament souvent les spécialités locales. Ils préfèrent également le jus de gingembre, de Bissap togolais », a avoué Issa Sanda (maître d’hôtel et un chef cuisinier).

Pour d’autres établissements hôteliers (à l’instar de Onomo Hôtel), l’utilisation des produits locaux crée non seulement la différence, mais valorise également la destination Togo et renforce l’image de marque de l’hôtel.

« Onomo est l’un des grands hôtels, où la cuisine togolaise est reine ! La valorisation des produits locaux est une priorité pour Onomo Hôtel. Au début de la création de l’hôtel, le directeur a été clair: il faut promouvoir les produits locaux. Vendre la destination Togo sera notre priorité. Ainsi, les mets typiquement togolais seront à l’honneur chaque jour, dans notre hôtel », a déclaré Serges Semeha, Chef de cuisine à Onomo.

« Nous cuisinons également européen, mais les ingrédients restent togolais. Nous disposons chez nous, de produits naturels que nous pouvons façonner, pour en tirer de belles choses à présenter à nos clients. Il suffit de faire appel à notre créativité… Je compose les menus, moi-même et j’ai une équipe formidable, doté d’un dynamisme sans pareil, ce qui est très important dans notre métier », dévoile Chef Semeha dans l’espace cuisine de l’hôtel. En quelques coup d’œil, il s’est rassuré que les commandes sont bien exécutées.

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Pour lui, les produits locaux ont non seulement de la valeur, mais en plus, ils sont frais, sains  et en plus, économiques. Sur les étagères, on peut voir divers produits locaux : gari, farine de maïs, de l’huile de coco,…

« L’huile de coco entre dans la confection de beaucoup de menus. Je l’utilise comme bain de friture pour le Koliko (frites d’igname), même le Zomi (huile rouge parfumé) est utilisée ici. La salade d’igname est une recette que chef Semeha propose à  ses clients… Le Ablô (beignets de maïs), Kôm ou Akpan (pâte de maïs fermenté) sont des garnitures qui ne manquent pas chez Onomo.

« Les produits locaux peuvent donc servir de matières premières, et nous permettre de servir des plats à la togolaise, grâce à notre sens de la créativité. Il faut faire des recherches et innover », a-t-il indiqué, surveillant son équipe activement occupé pour la confection du plat du jour : salade de gésiers (en entrée) + Sauce mouton accompagné d’igname pilé.

Pourquoi nos produits sont rares à table ? Comment valoriser les mets togolais, et créer l’émulation autour ?

« Il y a un +grand travail+ à faire en matière de sensibilisation du consommateur », a estimé Mme Isabelle Lejeune (coordonnatrice de la plateforme Souveraineté alimentaire), interrogée lors d’un atelier sur le même sujet.

Selon Marthe Agossou (cuisinière de formation), les mentalités n’ont pas trop changé par rapport aux produits locaux. Il y a également l’exigence de la clientèle et le manque de formation et de créativité des cuisiniers : « Il faut sensibiliser les cuisiniers sur l’importance d’utiliser nos produits ».

« Je pense qu’il faut organiser et multiplier des séances de dégustation, afin de susciter l’intérêt des clients. Une belle idée pour valoriser les produits locaux, c’est d’organiser chaque mois, une dégustation de mets à base de produits locaux typiquement togolais, et de montrer ainsi, la créativité des chefs et autres cuisiniers. Il faut également mettre en place une stratégie de promotion de nos produits », a-t-elle conclu.

Pour M. Semeha (Chef de cuisine à Onomo), les hôtels peuvent se ravitailler auprès des maraichers et se fier aux différentes coopératives de femmes spécialistes des transformations de produits locaux. « Nous disposons de tout : fruits, amuse-bouche, de vins et liqueurs…, tous issus du terroir ».

« Il faut motiver les cuisiniers et les amener à adhérer à l’idée de valoriser les mets locaux, et mettre en œuvre leur créativité. Nous disposons d’anciens mets qu’on peut revoir, actualiser et valoriser ».

« La belle idée serait d’organiser des compétitions locales, dotées de prix au niveau des hôtels. Les meilleurs peuvent bénéficier de bourses d’études et de stages, voyager aller voir ce qui se fait ailleurs et venir l’implémenter chez nous avec des produits locaux », a-t-il suggéré.

Pour Mme Candide Jibidar Norman (Attachée commerciale à Onomo Hôtel), il faut également sensibiliser les fournisseurs.

« La sensibilisation des fournisseurs est très importante, car les produits que nous recevons doivent répondre à certaines normes en matière d’hygiène. Nous sommes soumis à des normes d’hygiène, et donc il faut une rigueur en la matière. Et les fournisseurs doivent prendre toutes les responsabilités à ce propos », a-t-elle précisé.

Les efforts de l’Ong OADEL en matière de consommation locale

L’Organisation pour l’Alimentation et le Développement Local, est une Ong qui s’investit depuis sa création, dans la promotion des produits locaux, à travers diverses initiatives. Cette structure a édité un livre intitulé « 50 recettes du Togo », un recueil de recettes du Togo, revues, innovées et présentées pour une meilleure santé par les produits locaux.

Selon Tata Yawo Ametoenyenou (Coordonnateur des programmes de OADEL), il existe des produits locaux qui peuvent valablement suppléer ces produits extérieurs, mais que les consommateurs ne connaissent pas ou parfois délaissent pour diverses raisons, notamment l’ignorance, les préjugés, une transformation locale insuffisante des produits agricoles bruts, une absence de publicité et le « prestige » lié à la consommation des produits importés.

« Le Togo a une richesse culinaire inégalable. Et l’objectif de ce livre est de montrer comment valoriser autrement dans nos assiettes, les produits agro-alimentaires de nos terroirs, dans les maquis, les hôtels et dans les restaurants… Il s’agit pour OADEL d’amener les consommateurs à combiner autrement les ingrédients pour faire des recettes culinaires originales et merveilleusement salutaires », avait-t-il souligné.

Ce livre présente des entrées (entrées chaudes et entrées froides), des garnitures (céréales et tubercules), les sauces et des desserts. Comme entrées, on peut citer la salade d’igname (à la place de la pomme de terre).

Ambroisine MEMEDE

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